Février 2010
Taire la crise économique aux lycéens ?
Octobre 2009
Tribune du Monde en version intégrale et quelques compléments.
Octobre 2005
Le blues des étudiants en économie
2003
Critiques à propos de notre "Petit bréviaire des idées reçues en économie"
Septembre 2001
Fitoussi réhabilite le débat dans les études d’économie
Janvier 2001
Précisions sur l’enseignement de l’économie
2001
Lettre ouverte internationale VF
2001
Vive l’economie politique !
Décembre 2000
La economia de nuestros hijos
Novembre 2000
">Rebelión de los alumnos de Económicas en Francia contra la enseñanza "despegada de la realidad"
Juillet 2000
Les étudiants dénoncent l’autisme économique
Juillet 2000
L’économie, science autiste ?
Juillet 2000
¿Por qué una reforma de la enseñanza de la economía ?
Juillet 2000
Pourquoi une réforme de l’enseignement de l’économie ?
Juillet 2000
La révolte des étudiants
Juin 2000
Les économistes seraient-ils autistes ?
Juin 2000
Echec et maths
Juin 2000
Economie Autiste
Juin 2000
Vives critiques sur l’enseignement de l’économie à l’université
Juin 2000
Edito de Laurent Mauduit
Juin 2000
Politique
Nous vous proposons (un peu tardivement) la traduction d’un article paru dans le Handelsblatt (quotidien financier allemand), le 19 octobre 2009. Cet article a été écrit par un membre du mouvement autisme économie allemand et montre que outre-Rhin aussi la critique de l’enseignement de l’économie reste d’actualité !
HEIDELBERG. Par son ampleur et son intensité, la crise financière actuelle a débordé les capacités d’analyse de beaucoup d’économistes qui se contentaient jusqu’alors d’en appeler aux forces d’autorégulation du marché.
Cette soudaine mise à nu des limites d’une grande partie des théories économiques a en même temps été une mise en accusation de l’enseignement car il devenait clair que si celui-ci ne changeait pas, il finirait par perdre tout intérêt. Il est donc plus que temps, pour les économistes, d’examiner leur discipline de manière critique. Les approches alternatives ne manquent pas. Mais, il existe en économie un dangereux « monopole intellectuel », comme l’avaient désigné dès 1992 d’éminents économistes – notamment des prix Nobel comme Paul Samuelson ou Franco Modigliani – qui exhortaient au contraire à un « esprit pluraliste en science économique, goutant les différentes approches et poussant au dialogue mutuel, critique mais tolérant. » (référence ?)
Leur appel se démarquait de ceux qui avaient engagé la théorie économique sur une voie unique. La profession a, comme le dit Paul Krugman, « confondu avec la vérité la beauté dont d’impressionnantes formules mathématiques savent se parer. »
Peu de temps après, en 2000, s’initiait en France un mouvement, « autisme-économie », qui allait prendre une dimension internationale. Le coup d’envoi fut donné par un appel d’étudiants de la Sorbonne à Paris dans lequel ils déclaraient vouloir « sortir des mondes imaginaires ». Ils y critiquaient l’utilisation débridée et souvent dogmatique des mathématiques et demandaient une approche pluraliste, orientée vers des questions concrètes.
La critique fit grand bruit en France et fut suivie de déclarations de soutien venant du monde entier, plusieurs professeurs applaudissant l’initiative. D’autres étudiants, dont certains de Cambridge et d’Harvard, relayèrent l’appel et, aujourd’hui, le mouvement est devenu un réseau mondial, avec un « porte-parole », la Real-World Economic Review, qui a atteint plus de 11 000 adhérents. Depuis 2003, l’Allemagne a aussi son association d’économie « post-autiste ».
De notre point de vue, eu égard à la complexité et l’omniprésence des problèmes auxquels notre société moderne est confrontée (dégradation de l’environnement, crise financière, crise alimentaire, etc.), il est urgent d’examiner les choses avec lucidité. (…)
Il serait aberrant de nous priver de toute la diversité des théories et des méthodes existantes dans notre recherche des causes de ces crises et de nouvelles voies pour en sortir. Prenons par exemple, la question du réchauffement climatique : il y a, dans les théories dominantes, une branche consacrée à ce problème, celle de l’économie de l’environnement, qui pourrait tout à fait contribuer à la recherche d’une solution. Malheureusement, elle se contente de traiter des symptômes et ne considère pas les choses à leur racine. Au contraire, l’écologie politique avec son cadre d’analyse transdisciplinaire, qui incorpore la question des limites naturelles de la croissance économique et les découvertes de la thermodynamique permet de traiter cela bien plus en profondeur.
La crise financière actuelle fournit un autre exemple. Dans le monde des néoclassiques, la formation de la moindre bulle ou une crise majeure ne sont pas possibles. La foi aveugle dans les vertus des marchés ne pouvant être ici d’aucune aide, le cadre d’analyse retenu est tout simplement impuissant à expliquer la crise.
L’enseignement en économie ne doit donc pas se limiter à la théorie néoclassique, mais offrir une vue d’ensemble en présentant les divers courants qui traversent la discipline : l’économie écologique ou féministe, en passant par les approches postkeynésienne, marxiste ou institutionnelle-évolutionniste. Toutes ces théories forment ensemble une sorte de boîte à outils. Quel bon artisan se limiterait à n’utiliser que son marteau lorsqu’il a quelque chose à réparer ?
Les économistes doivent en outre être conscients des fondements normatifs et éthiques de leur propre théorie. Pour cela, il est nécessaire d’entamer une réflexion sur le développement, les prémisses et le contexte de leur propre discipline. Nous exigeons donc que les matières suivantes soient inclues dans le programme obligatoire d’économie : histoire de la pensée économique, histoire des faits économiques, éthique de l’économie et théories de la connaissance.
Malheureusement, une grande partie de la formation actuelle des jeunes économistes consiste simplement à rabâcher le contenu de cours magistraux. Obtenir des étudiants une pensée critique et autonome reste secondaire. Par le biais de discussions, il faut par conséquent encourager les étudiants à penser par eux-mêmes. Cours magistraux et travaux dirigés doivent être proposés dans des proportions équilibrées. Enfin, pour appréhender la complexité de nos sociétés, il est aussi nécessaire de promouvoir les échanges entre les disciplines des sciences sociales. Les projets interdisciplinaires faisant le lien avec les sciences sociales et de la nature (sociologie, psychologie, sciences politiques, philosophie, éthnologie, écologie, etc.) doivent être développés et intégrés dans les programmes.
Christoph Gran est membre du comité directeur du mouvement Postautistische ökonomie e.V. et chercheur associé à l’université de Ruprecht-Karls à Heidelberg
http://paecon.hallowiki.de/hallowelt/security/secureImage.php?f=/7/77/Postautisten_Handelsblatt.pdf